Hé...

 

 

 

 

 

 

La voiture est garée, je tourne la clef de contact et le moteur se tait. En ramassant mes clics et mes clacs éparpillés côté passager, je laisse mon regard divaguer alentour. Rien ne change ici. Et il fait beau, comme dans mes souvenirs. Pourtant j’adorais me promener dans le coin les jours de pluie. Pourquoi je me rappelle de cet endroit toujours sous le soleil ?

            Je suis devant la grille rousse –tiens, mon père a encore changé la poignée- et je sonne ; ça tinte à l’intérieur. Je m’attends à voir Clakos, le bâtard brun, arriver à fond de train en jappant. Mais rien n’arrive. J’entends juste que quelqu’un décroche le trousseau de clefs dans l’entrée et écarte le rideau de laine qui protège la porte. Au son, je visualise les gros anneaux de bois de ce rideau. Au son, je sais que c’est elle qui va m’ouvrir, les anneaux se sont entrechoqués dans un bruit sec. A travers la fenêtre de la porte, j’aperçois sa silhouette grise. Tout m’a toujours parût gris à travers ces carreaux « cathédrales ».

La porte s’ouvre sur elle, avec sa drôle de mine. Malgré le temps, malgré tout, malgré elle, quelque chose s’anime sous sa peau à ma vue. Elle se renfrogne, mais un coin de ses lèvres aurait envie de sourire alors qu’elle vient vers moi. J’attends de l’autre côté de la grille. Ce que je ressens ne m’étonne pas. Je savais bien que, même si je me sentais assez solide pour l’affronter, l’angoisse et l’appréhension pointeraient leurs nez de concert. Ce n’est pas un choc pour moi de me retrouver petite fille devant elle. C’est une vague de stress qui monte lentement et me rend presque nauséeuse. Et je sais qu’elle le sent. Elle a toujours eu le don de détecter les effets de son emprise sur les gens. Quatre ans après notre dernière rencontre, rien n’a changé.

Comme prise sur le fait d’une bourde, je ne peux réprimer un rictus de sourire forcé. En mettant la clef dans la serrure de la grille, elle lâche un « Hé Bin dis donc ! » mâchoires serrées ; et je ne peux que lui répondre, connement : »Hé ouaip… ». La fille et sa mère parlent le même langage finalement.



17/04/2008
1 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 17 autres membres