Vitesse illimitée
Vitesse Illimitée
Cramponnée au volant de mon corbillard blanc
Je trace les rides de ma solitude
Je creuse la tombe de mes espoirs
Toujours plus vite
Toujours en retard
Toujours en retard…
Au rendez-vous de mes files d’attentes
Je grille les feux monochromes de mes désirs,
Je coupe la route à la chance,
Je rate le pont des soupirs
Et prends la bande d’arrêt d’urgence pour un tremplin.
Pause carburant
Pour un jerrican d’humanité sans plomb.
Deux minutes trente,
Devant le guichet des hommes en blanc toujours en retard…
Blanchir mes os poreux sous les néons des officines,
Et reprendre le volant.
Celui qui tourne même à l’envers
Pour filer droit,
Droit devant.
Echapper à ce fantôme sur le trottoir,
Ce masque gris au regard ciguë
Qui m’empoisonne
Qui s’époumone
Qui me ressemble.
Pas de temps pour ça dans mon planning.
Pas de créneau introspectif
J’ai oublié les lamentations au pied du mur,
Qu’elles aillent pourrir aux objets trouvés !
Au fond de mes poches,
Au fond de mes yeux,
Plus assez de monnaie pour le péage,
Juste de la mitraille,
Espèces factices…
Pour passer à la caisse cette fois,
Je prends un crédit sur ma génération
A la banque nationale des fuyards.
Mais, merde !
Que quelqu’un me rattrape !
Que des bras m’enchaînent,
Qu’une voix couvre le bruit
De ce putain de moteur !
Mais y a pas d’âmes sous les képis,
Pas de secrets sur les panneaux,
Juste un peu de sang sur le bitume,
Et un visage dans le rétro.
Ce visage aux yeux venimeux,
Le mien, seulement le mien…
Je détourne le regard,
Première à droite.