De mon père
De mon père.
Je regarde ma peau changer de visage et je pense à la tienne…
Papa.
Il y avait des grands canyons, des ravins de silence dessinés sur tes mains.
Des autoroutes d'habitudes rassurantes,
Des ruelles de délinquances assumées
Et des impasses sans rêves, sans fonds…
Et dans tes paumes ouvertes sur ma fragilité,
Le toucher du bois chaud qui vibre sans but.
Cette écorce de tendresse aux tracés enchevêtrés.
Je suivais patiemment,
De la pointe de mes yeux neufs,
Leurs lignes sombres, dernières gardiennes des souvenirs…
Sous tes yeux que l'essence des jours carbonise,
Se creuse l'oubli en courbes tristes.
Et à ton front, les barreaux de ta prison intime
Laissent les beaux jours s'évaporer
Au prix de l'usure.
La tienne.
Vieil homme aux mains immenses,
Il me revient les ondulations caverneuses de ta voix.
Ses rides précoces et graves qui me berçaient de rires…
Ses variations sur tous les tons de l'adolescence,
Jusqu'à l'extinction,
Sur un non-dit.