Dragon
Dragon
Les mains fouillent la terre,
Les yeux dans la misère,
Au dessus de sa tête
De paysanne, de bête,
Passe l’ombre endeuillant le soleil,
La chimère séculaire, le dragon de lumière.
Il glisse sans détours et pulvérise l’air,
Il promène alentour ses prunelles vermeilles…
Un élan musculeux,
Et il crève les cieux.
Regard miraculeux,
Sans religion, sans dieux…
Et violant le torrent de son corps vipérin,
Il pénètre le flot, impétueux refuge
Et vient s’y reposer, majestueux saurien,
Insensible aux remous, au courant, au déluge…
Tel un cygne de fer, de cuivre et d’étain,
Il glisse sur l’onde folle, y plonge sa couronne
D’écailles et de cornes luisants dans le matin.
Puis il quitte le lit qui après lui, bouillonne…
D’un pas gauche et massif, il a rejoint la rive,
Pour étendre son corps sous le couvert des bois.
Pour endormir la braise de la flamme trop vive,
Qui palpite en son sein telle une puissante foi.
Si le culte du feu l’a emporté parfois,
Sur sa raison bestiale aux profondeurs magiques ;
Le Dragon s’évertue à lui dicter sa loi,
Car il sait le regret du moment fatidique.
Semer la destruction quand on est un titan,
N’a d’attrait au final que pour les imparfaits ;
Epargner à la fleur la colère d’un géant,
Est un art ineffable et gratifiant à souhait.
Le feu de ses entrailles, contenu jusqu’au bout
Il le réserve aux hommes en mal d’héroïsme.
Ceux que l’oubli effraye jusqu’à les rendre fous,
Chevaliers sanctifiés, comble du romantisme.